« Je suis extrêmement méticuleux sur le moindre détail. »
Alex Telfer a récemment remporté l’Or pour la seconde année successive avec « l’image la plus puissante » des trophées du magazine Campaign. Ce photographe anglais hyper-actif est reconnu pour son magnifique travail, principalement sur les visages, les scènes de vie ou paysages. Alex Telfer parvient à imposer son style avec des compositions sophistiquées et superbement détaillées. Il travaille pour les plus belles agences de publicité à travers l’Europe et les USA. Alex Telfer est représenté en France par Askmyagent.
3 Octobre 2010 – © Alex Telfer.
Bonjour Alex. On va commencer par le début, d’où êtes-vous originaire ?
Je suis de la région du Northumberland qui se situe à une demi-heure au Nord de Newcastle dans le Nord-Est de l’Angleterre. C’est plutôt rural et très calme ce qui fait un parfait contraste avec ma vie professionnelle. C’est un endroit pour se recharger et se détendre après les exigences liées à mon travail. D’un autre côté, Newcastle est considéré comme une belle destination pour faire la fête en Europe et est très dynamique pour une petite ville. J’ai un studio dans la banlieue Est de la ville, aménagé dans une église du XIXe siècle. C’est un bel endroit avec une bonne ambiance : parfait pour travailler.
Je sais que vous voyagez beaucoup, mais vous avez choisi de vivre dans le Northumberland. Est-ce que cet endroit a eu une influence sur votre parcours artistique ?
Oui je voyage beaucoup pour le travail, à travers l’Europe, les States ou bien ici, en grande-Bretagne. Je crois que j’ai pris cette décision il y a quelques années, de m’installer dans ma région d’origine… En tous cas pour l’instant. C’est une belle région avec à proximité la mer et la montagne. Le fait de pouvoir m’isoler un peu me permet de travailler plus librement, d’être plus créatif. Donc cela a certainement un effet sur mon travail puisque le simple fait de rentrer chez moi, me donne l’impression d’être temporairement en vacances. Et je suppose que vivre dans le Nord de l’Angleterre a également une incidence sur le look de mon travail. Newcastle et ses environs ont été des cités industrielles et je pense que cela a pour effet de donner une tonalité globale très directe et réaliste à mon travail.
Quelles ont été vos autres expériences artistiques et influences à l’adolescence ?
Ado, j’ai toujours été bon en art et j’adorais peindre et dessiner. Et ce, jusqu’à mes études supérieures où j’ai étudié l’art à un meilleur niveau. Je visitais beaucoup les galeries d’art et fréquentais tout le temps des gens qui partageaient les mêmes centres d’intérêt, d’une certaine manière ça fait quand même la différence pour ce que tu peux produire ensuite. C’est également ici que j’ai découvert la photographie. C’est rapidement devenu une obsession et je ne m’en suis jamais écarté. Avant d’entrer en immersion avec la Photo, j’avais pensé faire une carrière en direction artistique ou en graphisme et ce sont des métiers pour lesquels j’ai encore un grand intérêt. Mais c’est la Photo qui est devenu ma passion et qui l’est toujours. Ces deux dernières années j’ai redécouvert le dessin et je m’y remets parfois comme une sorte de relaxation.
J’ai lu qu’à la fin des années 90 vous êtes de retour au Northumberland après quelque temps à Londres et à cette époque vous faites beaucoup de noir et blanc. Pourquoi ça ? Était-ce une façon de sortir du mainstream ?
Après deux années à Londres pour mes études, je rentre chez moi et je commence mon travail de photographe, c’était en 1992. Je n’avais pas d’argent et cette situation économique dictait en quelque sorte le style de travail que je pouvais proposer aux agences de pub locales. Tout ce que j’avais est un Nikon FM2 avec un objectif 50mm et un 24mm. Le travail en couleur n’était pas super en 35mm alors je shootais en noir et blanc presque exclusivement et développais moi-même mes films avec la volonté de perfectionner les tirages. Les clients adoraient ça et j’ai rapidement gagné la réputation du gars qu’il fallait interroger pour des travaux publicitaires plutôt cools. Je m’éclatais bien et j’ai pu réaliser de super travaux alors cela a été le fondement de ma réputation de photographe publicitaire créatif. De telle sorte que je me suis toujours tenu en dehors du mainstream.
Quand avez-vous eu la conscience (ou simplement le souhait) de développer votre style personnel ?
Dès le départ, j’ai eu le désir de créer un style personnel et c’est quelque chose que j’ai beaucoup travaillé au fil du temps. Toutefois, on voit bien dans mes premiers travaux que mes influences provenaient de la photographie documentaire, plutôt que de la publicité, et cela m’a été très utile pour cultiver une différence, voir les choses autrement et appliquer tout ça au travail publicitaire.
Vous avez réaliser des tonnes de choses impressionnantes et variées, comment décririez-vous votre style ?
Mon travail de commande est très influencé par mon travail personnel. J’adore travailler sur des projets personnels et en général je réalise deux projets par an ainsi que de nombreuses images individuelles. Mon style personnel est plutôt documentaire dans son approche mais plus policé que mes commandes.
Comme je travaille avec un appareil Phase One P65+ la qualité et les possibilités sont énormes, aussi je suis très pointilleux sur les détails, la mise au point, etc. J’ai réalisé deux projets importants cette année, l’un intitulé « The Travellers » et l’autre « Saint Mary’s Asylum ». Les deux sont visibles dans la catégorie « project » de mon site. C’est important pour moi d’y consacrer du temps. C’est essentiel pour mon développement personnel et puis j’ai remporté plusieurs commandes grâce à l’impact de ces projets. Par exemple une commande sur laquelle j’interviens actuellement pour l’architecte Zaha Hadid à Londres. Les images de « The Travellers » lui ont tellement plu qu’elle m’a commandé 70 portraits de personnes de son équipe. C’est un projet sur deux mois. C’est une belle preuve qu’un travail personnel peut être à la fois gratifiant mentalement et commercialement.
Et à propos des images filmées ? Avez-vous un jour rêvé d’être réalisateur ou bien s’agit-il d’une évolution professionnelle ?
Je réalise des films publicitaires depuis 3 ans. Vous pouvez les voir dans le Showreel de mon site. Pour moi c’est une progression naturelle. Dans ce type de photographie qui est le mien, je dois diriger des gens de façon parfois complexe, alors la réalisation d’un film me semble un processus très simple. Cela me permet aussi d’avoir la main sur l’éclairage et de mettre en œuvre des moyens techniques que je connais bien. Beaucoup plus que certains réalisateurs qui comptent surtout sur leur chef opérateur. J’adore le mélange de prise de vue et tournage, le fixe et l’animé, et ces derniers temps on me demande souvent de combiner les deux disciplines.
Je travaille actuellement pour Guinness et ce n’est pas plus lourd qu’une prise de vue. L’agence m’a d’abord engagé pour une magnifique campagne photo en extérieur, mais l’idée leur a tellement plu que l’équipe créative en a aussi élaboré un scénario pour la télévision. Après le travail d’écriture et les réunions client, j’ai obtenu la réalisation du spot TV. C’est quand même le plus gros travail « combiné » sur lequel j’ai travaillé et qui doit s’achever dans deux semaines. Vous pourrez voir le film sur mon site le mois prochain (Novembre 2010).
TRAVELLERS, Shaun, Taping His Hands Before A Boxing Session, The Romany Way Gym, Craghead, UK © Alex Telfer
Est-ce que vous vous souvenez de votre premier prix ?
J’ai eu la chance de travailler avec des gens formidables qui m’ont offert de grandes opportunités ainsi que la liberté de créer des œuvres primées. Mon premier prix date de 1992, dans ma première année d’activité où j’ai obtenu le prix publicitaire du Nord de l’Angleterre.
C’était avec mon travail en noir et blanc que je mentionnais plus tôt et cela m’a ouvert à un plus large public. J’ai vite pris conscience de l’importance de cette exposition positive qu’apportent les prix. Depuis, j’ai continué à être très prolifique dans le monde des reconnaissances photographiques et publicitaires. Campaign Magazine qui est la principale publication professionnelle a élu mon travail « images les plus puissantes de l’année » en 2009 et 2010, un honneur dont je suis très fier. Dans mon métier, il est toujours rafraîchissant d’être jugé par les autres et c’est particulièrement agréable lorsque leur jugement est positif!
Vous êtes installé dans Kingsland Church… Pouvez-vous nous expliquer ce que vous en avez fait ?
J’ai acheté Kingsland Church en 2005, ce n’était pas une ruine mais disons que son état était misérable. J’ai dessiné les plans et dirigé les travaux durant huit mois. Cette église a servi ma notoriété car c’est un très bel endroit. Nous avons shooté « Enfance Et Partage » ici avec M & C Saatchi GAD en 2008. J’y ai installé mon équipe de production, post production et ma Galerie. Toutefois, le développement de mon activité de photographe m’éloigne de plus en plus souvent de l’Église donc je suis actuellement en train d’envisager son développement en un centre créatif pour des indépendants. Des artistes, graphistes, designers et même un encadreur sont actuellement en discussion avec moi pour entrer dans ce nouveau centre. Bien sûr mes bureaux seront toujours là, mais je vais cohabiter avec d’autres créatifs. J’ai toujours senti que l’église devait se développer en quelque chose de nouveau et c’est ce qui arrive actuellement.
Vous avez une équipe de production intégrée, quels services offrez-vous exactement ?
Tous les services de la prod photo, c’est-à-dire de la préparation en amont à la retouche finale.
Quel genre d’appareil photo aimez-vous utiliser ?
J’utilise un Phase One P65+ qui est fabuleux et qui correspond bien aux types de travaux que l’on me demande en raison de la qualité de rendu des détails (60.5 mega pixels) autour de ça, j’ai bien sûr un équipement très complet.
Pour les images filmées j’utilise le Canon 5D mark 2 avec un set complet d’optiques Zeiss.
Quel est le meilleur conseil que vous ayez reçu ?
Le meilleur conseil que j’aie jamais reçu est de rester fidèle à sa propre discipline et faire le travail qui vous permet de rester heureux et comblé. De cette façon, vous gagnerez en longévité dans ce que vous entreprenez. Ce qui est vrai.
Et le conseil que vous donneriez à un jeune étudiant ?
Le conseil que je donne toujours aux étudiants est de ne pas être absorbé par l’argent mais de se concentrer pour faire de belles réalisations qui produiront un excellent travail. En faisant cela d’abord et avant tout, on peut alors espérer que les revenus suivront automatiquement.
Merci beaucoup Alex!
Représentation:
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